Quand les jeunes font la guerre au poil

«Plus propre», «plus net». Le corps de certains jeunes gens n’arbore désormais plus l’ombre d’un poil et cette génération ne jure plus que par le glabre, partout: torse, aisselles, pubis… tout y passe, aussi bien chez ces demoiselles que chez les messieurs.

«La touffe, c’est un signe de laisser-aller pour moi». En matière de pilosité, Lou, 22 ans, a une tolérance limitée. Adepte de «l’intégrale», la jeune fille a commencé à s’épiler à 17 ans, et depuis, pas de répit pour sa toison.

«Les poils, ça me dégoûte, autant tout enlever», explique-t-elle. Peur d’être «anormale» aussi.

Torse doux, aisselles lisses et … «le bas aussi», Jordan, 24 ans, dit avoir «toujours fait ça. Je trouve ça plus propre, je préfère… pour moi et les filles aussi».

À l’image des 15-30 ans, Lou et Jordan (les prénoms ont été changés) ont fait table rase de leur pelage originel. Seul épargné: le poil facial pour les hommes, la barbe — signe de virilité — que Jordan arbore avec une pousse de trois jours.

«Le dos, les épaules, les jambes le torse, puis le ventre, ça existait déjà. Mais pour l’intime chez les hommes, la demande a au moins triplé depuis cinq ans», confie Claire Philipponneau, esthéticienne chez Elixir Beauté, un salon de beauté dont la moitié de la clientèle est constituée d’hommes.

«L’intime», un terme marketing pour parler du pubis avec la même pudeur qui amène certains salons à ne pas afficher les tarifs pour ce genre de prestation, même si elles sont bien proposées aux hommes.

Sillon inter-fessier

Rasoir, tondeuse, crème dépilatoire: les adolescents n’ont pas toujours les moyens de s’offrir une épilation, mais la professionnelle, elle, ne jure que par la cire. Tout y passe, «y compris le sillon inter-fessier», précise-t-elle.

Quant aux filles, l’esthéticienne estime que la majorité des vingtenaires sont passées à l’intégral. «70 % des moins de trente ans demandent ça à présent», a-t-elle dit.

Et d’ajouter: «Dès qu’elles ont quelques poils, les clientes se sentent moins nettes. Question de confort sexuel. Pour les hommes aussi d’ailleurs.»

Une tendance hygiéniste d’après le sociologue Christian Bromberger, auteur des Sens du poil: «On est entré dans une époque obsédée par les bonnes odeurs. C’est l’idée du net, de l’aseptisé, de l’inodore, une lutte contre l’animalité», analyse-t-il.

«Cette génération opère une petite révolution», selon l’expert: la bande de poils qui coupait encore l’enfance de la puberté a disparu. Les jeunes plongent dans «un futur androgyne tels les héros de science-fiction totalement imberbes», poursuit Christian Bromberger.

Ce goût pour l’imberbe en a pris de court certains: Claire Philipponneau regrette le manque de formation aux épilations intimes masculines.

Elle qui doit s’armer d’une pince et d’une loupe pour ce travail minutieux lâche: «Le problème, c’est que beaucoup de salons commencent à s’y mettre, mais les filles ne sont pas formées en école. Elles s’exercent sur le tas… Et un homme, c’est délicat.»

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